mardi 11 octobre 2011

Sém.IV leçon 9 : La fonction du voile.




     Séminaire LA RELATION D OBJET ET LES STRUCTURES FREUDIENNES


     1 ère partie :   THEORIE DU MANQUE D OBJET
        1. introduction
        2. les trois formes du manque d'objet
        3. le signifiant et le saint-esprit
        4. la dialectique de la frustration
        5. de l'analyse comme bundling et ses conséquences.
     2 ème partie : LES VOIES PERVERSES DU DESIR
        6. Le primat du phallus et La jeune homosexuelle
        7. "On bat un enfant" et La jeune homosexuelle.
        8. Dora et la jeune homosexuelle.             
     3 ème partie :  L'OBJET FETICHE
        9. La fonction du voile.


La question de l'objet
est matérialisée de façon particulièrement aiguë avec le fétiche et le fétichisme.

Les schémas fondamentaux que j'ai apportés
 s'expriment tout spécialement dans ces 2 affirmations paradoxales
1)ce qui est aimé dans l'objet, c'est ce dont il manque 2)on ne donne que ce qu'on n'a pas.

Le schéma qui implique, dans tout échange symbolique (et quel que soit son sens fonctionnement)
la permanence du caractère constituant d'un au-delà de l'objet, nous permet
de voir sous un jour nouveau, et d'établir différemment les équations fondamentales
de cette perversion qui a pris rôle exemplaire dans la théorie analytique : le fétichisme.
Freud aborde cette question principalement dans 2 textes, entre 1904 et 1927 : un paragraphe
sur le fétichisme dans Trois essais sur la théorie de la sexualité et un article intitulé Le fétichisme.
Il nous parle d'emblée du fétiche comme symbole de quelque chose, mais que, au regard de
de tout ce qui se dit sur le fétiche depuis qu'on parle de l'analyse nous allons être déçus.
Il dit que ce symbole c'est le pénis, mais pas n'importe lequel : le pénis dont il s'agit
n'est pas le pénis réel, c'est le pénis qu"a" la femme, c'est celui que la femme n'a pas.


 Certains n'y voit que méconnaissance du réel, croyant qu'il s'agit du pénis que la femme n'a pas
et qu'il faudrait qu'elle ait, du fait du rapport douteux de l'enfant avec la réalité. Spéculations sur
le développement et les crises du fétichisme qui éludent l'important, et conduisent à des impasses.
Il faudrait des heures pour détailler cette forêt, tant est délicat et fastidieux de situer le point
           où une matière se dérobe parce que l'auteur évite le point crucial d'une discrimination.

On peut éviter ces errances et pointer de dont il s'agit en précisant que :
il n'agit pas d'un phallus réel qui existe ou n'existe pas, il s'agit d'un phallus symbolique
qui fonctionne dans l'échange comme absence, en tant qu'absence.
Car
tout ce qui peut se transmettre dans l'échange symbolique est toujours quelque chose qui
est autant absence que présence, fait pour avoir cette sorte d'alternance fondamentale
qui fait qu'étant apparu en un point, il disparaît, pour reparaître en un autre.
 Il s'agit du phallus en tant qu'il circule et laisse derrière lui, au point d'où il vient,
 le signe de son absence : il est un objet symbolique.

D'une part il s'établit, par cet objet, un cycle structural de menaces imaginaires qui limite
l'usage du phallus réel : c'est le sens du compl. de castration, en cela que l'homme y est pris.
Et il y a l'autre usage, caché, si l'on peut dire, caché par les fantasmes + ou - redoutables
de la relation de l'homme aux interdits sur l'usage du phallus. C'est sa fonction symbolique.
C'est uniquement en tant
qu'il est , ou qu'il n'est pas là, que s'instaure la différenciation symbolique des sexes.
C'est à dire toujours là/pas-là = au-delà de toute relation entre l'homme et la femme.

Symboliquement, la femme ne l'a pas. Mais n'avoir pas le phallus symboliquement,
c'est l "avoir" .. à titre d'absence.
Ensuite, en tant que dans la réalité elle n'en a qu'un tout petit, ce phallus de la réalité peut être
 à l'occasion objet de nostalgie, être ressenti du coté de l'insuffisance. Mais ce phallus là
n'est pas le seul qui entre en fonction pour elle, car elle est dans la relation subjective où,
pour l'homme, il y a, au-delà d'elle, ce phallus qu'elle n'a pas, ce phallus symbolique
qui existe là en tant qu'absence. Un phallus qui n'a rien à voir avec l "infériorité" ressentie
occasionnellement au plan imaginaire pour ce qui concerne sa participation réelle avec le phallus.
(clitoris+organe sexuel féminin en tant que creux ne font pas image comme érection pén.NDMM)
C'est ce pénis symbolique que je place dans le schéma de la jeune homosexuelle,
en tant qu'il a une fonction essentielle dans l'entrée de la fille dans l'échange symbolique.
Car c'est en tant qu'elle n'a pas ce phallus, donc qu'elle l'a sur le plan symbolique, c'est à dire
en tant qu'elle entre dans la dialectique symbolique d'avoir ou de n'avoir pas le phallus,
et par là dans cette relation ordonnée et symbolisée de la différenciation des sexes,
cette relation interhumaine assumée, disciplinée, typifiée, ordonnée, marquée, frappée d'interdits
comme par exemple la structure fondamentale de la loi de l'inceste.
C'est cela que veut dire Freud  quand il écrit que c'est par l'intermédiaire
de "l'idée de castration" -qui est que n'ayant pas le phallus, elle peut l'avoir symboliquement,
que la fille entre dans le complexe d'œdipe (et le garçon en sort).

C'est en ceci que se justifie, structuralement parlant,
l'androcentrisme dans le schéma lévi-straussien des structures élémentaires de la parenté :
C'est un fait : les femmes s'échangent comme objets entre les lignées
et les lignées sont fondées sur la lignée mâle parce qu'elle est symbolique et improbable.

Elles entrent dans les lignées par un échange :
en échange de ce phallus qu'elles reçoivent symboliquement elles donnent un enfant .
L'enfant prend fonction d'équivalent du phallus, enfant par quoi elles introduisent,
dans la généalogie symbolique phallocentrique et stérile, la fécondité.

En se rattachant à cet "objet" unique, central, (qui n'est pas un objet car il a subi radicalement
la valorisation symbolique) en le prenant comme intermédiaire du rapport au phallus,
 les femmes entrent ds la chaîne de l'échange symbolique, y prennent place, et valeur.

On voit cela s'exprimer de mille façons. Par exemple ce thème fondamental que
la femme se donne : qu'exprime-t-il, sinon l'affirmation du don ? l'expérience psychologique
concrète -paradoxale- montre que dans l'acte d'amour c'est la femme qui, concrètement,
reçoit, plus qu'elle ne donne. Or tout indique, et l'expérience analytique aussi, qu'il n'y a pas de
position imaginairement plus captatrice, voire dévorante. Que cela soit renversé en l'affirmation
contraire -la femme se donne- c'est que symboliquement il doit en être ainsi, à savoir :
qu'elle doit donner quelque chose en échange de ce qu'elle reçoit, le phallus symbolique.

Le fétiche, (Freud) représente le phallus en tant qu'absent, symbolique. Le "renversement"
permet de comprendre ce paradoxe que c'est toujours le garçon qui est fétichiste, jamais la fille.
Si tout était sur le plan de la déficience, de l'infériorité imaginaire, ce serait plutôt chez elle,
 réellement privée du phallus, que le fétichisme devrait se déclarer le plus ouvertement.
Or il n'en est rien, c'est excessivement rare, au sens propre et individualisé où il s'incarne
dans un objet répondant d'une façon symbolique au phallus en tant qu'absent.

Comment peut s'engendrer cette singulière relation du sujet à un objet qui n'en est pas un ?

Si le fétiche est symbole -dit l'analyse- il est sur le même pied que tout symptôme névrotique.
Sauf que :avec le fétichisme on est du coté de la perversion et pas de la névrose, en tout cas
nosographiquement, pour des raisons d'apparence clinique. Mais il faut y regarder de près
pour le confirmer dans la structure, du point de vue de l'analyse.
Pas comme ces auteurs qui mettent le fétichisme à la limite des perversions et des névroses,
au prétexte de caractère élèctivement symbolique du fantasme crucial.

Partons du plus haut de la structure, et arrêtons-nous à cette position d'interposition qui fait que
ce qui est aimé dans l'objet d'amour est quelque chose qui est au-delà. "Quelque chose",
rien sans doute, et qui pourtant est là symboliquement, et parce qu'il est symbole non seulement
il peut, mais il doit être ce rien. Ce qui matérialise le mieux cette relation d'interposition, où ce qui
est visé est au-delà de ce qui se présente, c'est une des images les plus fondamentales de la
relation humaine au monde : le voile, le rideau. Un rideau ou un voile devant quelque chose,
 c'est ce qui permet le mieux d'imaginer la situation fondamentale de l'amour : par la présence
du rideau ce qui est au-delà comme manque tend à se réaliser comme image. Sur le voile
se peint l'absence, c'est même la fonction du rideau, qui prend valeur et consistance d'être,
justement, ce sur quoi se projette et s'imagine l'absence : le rideau c'est l'idole de l'absence.
C'est pour cela que le voile de Maya  est la métaphore la plus commune pour exprimer le rapport
de l'homme avec ce qui le captive, ce sentiment qu'il a d'une certaine illusion fondamentale dans
tous les rapports tissés de son désir. C'est bien là ce dans quoi l'homme incarne,
idolifie son sentiment de ce rien qui est au-delà de l'objet d'amour.
Gardez à l'esprit ce schéma fondamental
pour situer correctement les éléments qui entrent en jeu dans l'instauration du fétichisme.



    
                                                                  schéma du voile, 

                                                                ( http://cause.des.filets.fr/Diable_amoureux.shtml )

Nous avons le sujet,
et nous avons l'objet avec son "au-delà" qui est "rien", symbole, phallus manquant à la femme.

Dès qu'un rideau ou voile est placé, sur lui peut se peindre quelque chose disant :  l'objet est au-delà.
L'objet peut alors être en place du manque,  être le support de l'amour, en tant que justement
il n'est pas le point où s'attache le désir. D'une certaine façon le désir apparaît comme une
 métaphore de l'amour, mais ce qui l'attache, l'objet, semble valorisé en tant qu'il est illusoire.
On nous explique le fameux "splitting" de l'ego, quand il s'agit du fétiche, en disant que la femme
y est à la fois affirmée et niée, que le fétiche étant là elle n'a pas perdu le phallus.
Mais du même coup on peut le lui faire perdre = la châtrer. Cette ambiguïté est constante, 
sans cesse manifeste dans les symptômes : vécue en même temps dans une illusion soutenue
soutenue et chérie comme telle, et dans l'équilibre fragile à la merci de l'écroulement ou
ou du lever du rideau. La relation du fétichiste à son objet est dans ce rapport. Freud utilise
le mot Verleugnung pour la relation fondamentale de déniement ds la relation au fétiche,
mais précise qu'il s'agit de faire tenir debout (aufrecht zu halten) cette relation complexe.
Comme il parlerait d'un décor. C'est la langue de Freud, si imagée et précise à la fois, en termes
qui prennent ici toute leur valeur : l'horreur de la castration s'est à elle-même posé, par la
création d'un substitut, un monument. Le fétiche est un Denkmal. Pas "trophée", pourtant
il est là, doublant le signe d'un triomphe (das Zeichen des Trimphe) Maintes fois d'ailleurs,
autour de ce phénomène typique du fétichisme, les auteurs parlent de ce par quoi
le sujet héraldise son rapport avec le sexe. Freud ici nous fait faire un pas de plus.

Aller tout de suite au "pourquoi" (pourquoi le sujet a besoin d'un voile), nous ferait tomber dans
le chaos pandémoniaque de ces tendances qui viennent en foule expliquer que .. le sujet peut
 être .. plus ou moins loin de l'objet .. se sentir arrêté par lui .. menacé par lui ..en conflit avec lui ..
Restons-en à la structure celle qui est dans le rapport de l'au-delà et du voile :
1. sur le voile peut s'imager = s'instaurer comme capture imaginaire et place du désir,
la relation à un au-delà, fondamentale dans toute instauration de la relation symbolique.
 = dans la fonction du voile il s'agit de la projection de la position intermédiaire de l'objet.
2. toujours sur l'institution d'un rapport symbolique dans l'imaginaire, nous avons vu à propos
de la structure perverse, la métonymie, et l'allusion, la lecture entre les lignes comme formes
 élevées de la métonymie. Et bien sauf qu'il n'emploie pas le mot métonymie, c'est pourtant ce
que dit Freud quand il dit que ce qui constitue le fétiche, l'élément symbolique qui le fixe
 et qui le projette sur le voile, est un élément emprunté à la dimension historique :
c'est le moment de l'histoire où l'image s'arrête.

Il y a un moment où est cherché dans la mère ce phallus qu'elle a et qu'elle n'a pas,
moment qui est à penser en termes de présence/absence, absence/présence. 
Dans la remémoration de l'histoire, juste avant ce moment on trouve un arrêt, une suspension,
comme un film qui soudain se figerait. "Remémoration" est à rapprocher de souvenir-écran,
Deckerinnerung : plus que d'un simple instantané, il s'agit d'une interruption de l'histoire.
L'histoire marque l'arrêt, et indique aussi que son mouvement se poursuit .. au-delà du voile.
Le souvenir-écran est un arrêt dans une chaîneil est relié à toute une histoire, une histoire
constituée de sa nature. Ce en quoi il est métonymique. 
Mais en faisant arrêt, la chaîne indique une suite désormais voilée, absente, "refoulée", comme
Freud le dit nettement. Nous parlons de refoulement qu'en tant qu'il y a chaîne symbolique.
Or, si on désigne comme point de refoulement un phénomène qui passe pour imaginaire (le fétiche
est d'une certaine façon une image, projetée) c'est parce qu'une image peut faire point limite 
entre l'histoire qui se continue et un moment d'interruption : signe, repère du point de refoulement.
Nous voyons se distinguer là, une fois de plus, deux relations différentes :
La relation à l'objet d'amour d'une part, la relation de frustration à l'objet d'autre part.

Par une métaphore l'amour se transfère au désir, qui s'attache à l'objet illusoire.

La constitution de l'objet n'est pas métaphorique, elle est métonymique : un point, dans
la chaîne de l'histoire, un signe qu'elle s'arrête, que là commence un au-delà constitué par le sujet
Pourquoi ? Pourquoi là ? Pourquoi le voile est-il plus précieux à l'homme que la réalité ?
Pourquoi cette cette relation illusoire devient-elle un constituant essentiel, nécessaire,
du rapport avec l'objet ? C'est la question posée par le fétichisme.

Beaucoup de choses s'éclairent à partir de là et du 1er exemple d'analyse du fétichisme par Freud
avec cette merveilleuse histoire du monsieur ayant passé son enfance en Angleterre, venu se faire
fétichiste en Allemagne : il cherchait toujours "un petit brillant sur le nez" parce que du
"a glance at the nose" lui venant de ses 1ère années, il avait fait "ein Glantz auf die Nase" 
peu importe que la signification soir un regard sur le nez. Symbole, bien sûr. Ainsi entre en jeu
et se projette en un point sur le voile la chaîne historique, qui peut contenir non seulement
toute une phrase, mais plus encore, une phrase dans une langue oubliée.

Quant aux causes de la structure fétichistes, les auteurs sont embarrassés :
il y a cette notion de la genèse du fétichisme articulée essentiellement au compl. de castration,
mais il y a aussi ce fait que c'est dans les relations pré-œdipiennes et nulle part ailleurs qu'il paraît
le plus certain que la "mère phallique" est l'élément central. Pour joindre ces deux choses
les auteurs ne sont pas à l'aise. Du coté de l'école anglaise et M. Klein, on structure
les 1ères étapes des tendances orales, les moments les plus agressifs surtout, en introduisant
la présence du pénis paternel par projection rétro active, par rétro action du complexe d'oedipe
dans les 1ères relations avec les objets, qui sont introjectables. Cela facilite l'accès à un matériel
qui permet d'interpréter de quoi il s'agit. Laissons de coté la critique du système de M. Klein,
et tenons-nous en à ce que nous avons, en partant de la relation fondamentale
de l'enfant réel, de la mère symbolique, et de son phallus -imaginaire- à elle.
C'est un schéma à manier avec précaution
car il se concentre sur un même plan
alors qu'il répond à des plans divers et entre en fonction à des étapes successives.
Pendant longtemps l'enfant n'est pas en mesure de s'approprier
la relation imaginaire qui fait la division de la mère à son sujet. C'est ce que nous tenterons
cette année d'élucider : comment et quand cela entre en jeu pour l'enfant, et comment se fait
son entrée dans la relation à l'objet symbolique dont le phallus est la monnaie majeure.
Questions temporelles, chronologiques, d'ordre, de succession,
comme l'indique la psychanalyse sous l'angle de la pathologie.

Les observations montrent ce qui est corrélatif à ce singulier symptôme : un sujet en relation
élective à un fétiche, objet fascinant inscrit sur le voile, et autour de quoi tourne sa vie érotique.
On voit à l'analyse (pas simple description clinique) que ce sujet a sa liberté de mouvement. Et aussi
très bien les éléments que je vous ai articulés et signalés par Binet comme par exemple ce point,
saisissant, du souvenir écran qui fixe l'arrêt (au bas de la robe de la mère, voire de son corset)
ou le rapport ambigu du sujet au fétiche : un rapport d'illusion, vécue et préférée cmme telle.
Ou la fonction si satisfaisante de l'objet inerte, à la merci du sujet pour ses relations érotiques.
Et l'analyse peut cerner ce qui se passe chaque fois que, pour une quelconque raison
le recours au fétiche fléchit, s'exténue, s'use, ou se dérobe, simplement.
Le comportement amoureux, la relation érotique du sujet, se résumant à une défense ?
C'est dans l'International journal (voir Payne, Greenacre, Gillepsie, Dugmore) ou les travaux
dans le Psycho-analytic study of child. C'est articulé dans notre schéma, Freud l'a entrevu
(quand il dit que le fétichisme est une défense contre l'homosexualité), ou Gillepsie (que la marge
entre les deux est extraordinairement mince. Bref : que nous trouvons dans les relations à
l'objet amoureux qui organisent ce cycle chez le fétichiste une alternance d'identifications :

- soit identification à la femme : avec pénis et phallus imaginaires des expériences de la période
oro-anale centrées sur l'agressivité, de la théorie sadique du coït, (bien des expériences en analyse
montrent une vision de la scène primitive perçue comme agressive, violente, voire meurtrière)
- soit inversement identification au phallus imaginaire comme pur objet que la femme pourrait
dévorer voire détruire.
= oscillation aux deux pôles de la relation imaginaire primitive à quoi l'enfant est confronté
de façon brute, avant que la relation s'instaure dans sa légalité œdipienne
par l'introduction du père comme sujet, centre d'ordre et de possession légitime.

Oscillation bipolaire de la relation,
 entre deux 2 objets inconciliables aboutissant de toute façon à issue destructrice, meurtrière.
C'est ce qu'on trouve au fond des relations amoureuses
chaque fois qu'elles sont soulevées, qu'elles tendent à s'ébaucher, qu'elles tentent de s'ordonner.
Dans la voie moderne de l'analyse, qui me rappelle mon propre chemin, l'analyste intervient là,
pour faire percevoir au sujet l'alternance de ces positions et leur signification,
introduire la distance symbolique nécessaire au sujet pour qu'il en perçoive le sens.
Ces observations, riches, fructueuses, nous montrent les mille formes que peut prendre,
ds la vie précoce du sujet, le décomplétage fondamental qui le livre à la relation imaginaire 
soit par identification à la femme / soit de la place prise du phallus imaginaire,
c'est à dire dans les deux cas dans une insuffisante symbolisation de la relation tierce.
(Des auteurs notent l'absence quelquefois répétée, la carence comme on dit, du père. (attention :
 Lacan va revenir sur ceci plus loin pour le nuancer NDMM), ainsi qu'un certain type de position
du sujet : une immobilisation forcée, singulièrement reproduite ds certains fantasmes. Payne par ex
rapporte un cas de ligotage suite à 1 extravagante prescription médicale, un enfant empêché de
marcher jusqu'à 2 ans, maintenu au lit par des liens, dans la chambre de ses parents. Etroitement
surveillé, sans aucune ébauche de réaction musculaire, il était dans 1 relation purement visuelle,
 relation aux parents assumée dans la rage et la colère qu'on peut supposer. Cas rares, comme ceux
évoqués de la phobie de certaines mères qui les fait tenir leur enfant à distance comme s'il était
source d'infection, (NDMM : et si = peur de l'infecter ?..) qui doivent contribuer à une prévalence
de la relation visuelle dans la constitution primitive à l'objet maternel).

Plus instructive que des exemples de "viciation" de la relation primaire est la relation pathologique
prise comme envers, ou complément, de l'adhérence libidinale au fétiche. La parenté avec
le fétichisme, qui englobe toutes sortes de phénomènes, est un peu guidée par l'intuition :
tel sujet attaché à un imperméable paraît de même nature que tel autre attaché à ses souliers.
Pourtant, structurellement parlant,
l'imperméable contient par lui-même des relations et une position différentes de celles du soulier :
le soulier est directement dans la position de voile entre le sujet et l'objet.
L'imperméable déjà fait partie des fétiches plus enveloppants, de plus il se signale par la
qualité -spéciale- du caoutchouc, trait fréquemment rencontré, et qui recèle quelque mystère
ayant à voir avec la sensorialité (contact spécial avec le caoutchouc proche d'une doublure de
peau) ou avec des capacités d'isolement spéciales. De la structure des rapports délivrés dans
certains centres où l'observation est faite analytiquement, on voit que l'imperméable joue un rôle
qui n'est pas exactement celui du voile. Le sujet ne se situe pas devant le voile, le voile est
plutôt quelque chose derrière quoi le sujet se centre, à la place de la mère, en identification à
une mère qui a besoin d'être protégée. Ici c'est par l'enveloppement.
C'est plutôt du coté du transvestisme où l'enveloppe est plus de l'ordre de la protection que
du voile, comme une égide ** , en fait, dont s'enveloppe le sujet identifié au personnage féminin.

Autre relation particulièrement exemplaire : des explosions d'exhibitionnisme, soit réactionnel
soit en alternance avec le fétichisme, observés quand le sujet tente de sortir de son labyrinthe à cause
d'une mise en jeu du réel qui l'a déstabilisé, qu'il y a cristallisation ou renversement de sa position.
Pensez à la jeune homosexuelle quand l'introduction du père comme élément réel fait s'interchanger
 les termes : quand ce qui était situé dans l'au-delà (le père symbolique) est pris dans la relation
  imaginaire, et que le sujet prend une position homosexuelle démonstrative par rapport au père.

Autres très jolis cas de sujets qui, en tentant d'accéder à une relation pleine (ds des conditions
de réalisation artificielle, de forçage du réel) expriment par un acting-out, donc au plan imaginaire,
ce qui était symboliquement latent à la situation. Exemple : un sujet tente pour la 1ère fois un rapport
réel avec une femme, mais s'engage dans cette expérience pour montrer ce qu'il est capable de faire.
Il y réussit plus ou moins bien grâce à l'aide de la femme ... mais dans l'heure qui suit, et alors que rien
ne laissait prévoir chez lui que de tels symptômes soient possibles, il se livre à une exhibition.
Très singulière, fort bien calculée : il va montrer son sexe au passage d'un train international,
 là où personne ne peut le prendre la main dans le sac.
Le sujet a été forcé de donner 1 issue à quelque chose qui était implicite, son exhibitionnisme
fut l'expression, la projection, au plan imaginaire, de ce dont il n'avait pas compris les implications
symboliques, à savoir que dans l'acte qu'il venait d'accomplir il ne s'agissait que d'essayer de
montrer qu'il était capable d'avoir une relation normale. 1 forme d'exhibitionnisme réactionnel,
qu'on retrouve  dans des observations voisines du fétichisme, d'autres carrément fétichistes :
on sent que ces actes délinquants sont des équivalences du fétichisme.
[M. Schmideberg : un homme a épousé une femme deux fois plus grande que lui, un ménage où il
jouait le rôle d'ubuesque souffre-douleur en faisant de son mieux face à l'horrible situation. Averti
qu'il va être père, se précipite dans 1 jardin public et montre son organe à 1 groupe de jeunes filles.
Mme Schmideberg, ici un peu trop Anna-freudienne, fait toutes sortes d'analogies ... son père était
déjà un tant soit peu victime de sa femme et s'était dégagé de la situation en se faisant surprendre
avec une bonne, et avait mis sa conjointe à sa merci par l'intermédiaire de la revendication jalouse.
Cela n'explique rien, et Schmideberg évite le principal.
Elle croit avoir analysé (short analysis en plus) une perversion. Mais pas la peine de s'émerveiller,
il n'y a pas plus de perversion que d'analyse. Elle laisse de coté que ce qui s'est manifesté,
par un acte d'exhibition, c'est du sujet : on ne peut expliquer cet acte qu'en se référant
au mécanisme de déclenchement par quoi c'est ce qui vient là en plus dans le réel, et qui est
 inassimilable symboliquement, qui fait se précipiter ce qui est au fond de la relation symbolique,
à savoir l'équivalence phallus-enfant.
Faute de trouver une autre façon d'assumer cette paternité, faute même d'y croire, le brave homme
est allé montrer au bon endroit l'équivalent de l'enfant,
soit ce qui lui restait alors comme usage de son phallus.

30 janvier 1957.


Et comme Lacan suit admirablement son fil, de séminaire en séminaire, et de leçon en leçon,
dans la prochaine il sera question de L'IDENTIFICATION AU PHALLUS.


http://divanfauteuilgargoulettepsychanalyse.blogspot.fr/2011/10/seminaire-iv-lecon-10-lidentification.html
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